« Je grimpe avec des amis qui ont une alimentation pas du tout adaptée, complètement anarchique et qui arrivent quand même à performer. C’est à se demander si la nutrition joue vraiment un rôle dans nos performances !»
Ce couplet je l’entends régulièrement, de la part de grimpeurs qui se sentent un peu frustrés parce qu’ils font attention à ce qu’ils mangent et grimpent pourtant dans des cotations moins élevées que certains de leurs partenaires qui se gavent de burgers, de pizzas et ne ratent jamais le debrief de fin de séance autour de la bière de récupération. On en croise tous, et généralement plus les jours où rien ne va pour nous, pied qui zippe, voie patinée, neige trop molle et mental qui lâche.
Difficile alors d’imaginer un lien entre performance et alimentation. Plusieurs paramètres sont à prendre en compte.
Premièrement, nous sommes tous différents, je le répète assez souvent. Nos métabolismes sont différents, nos aptitudes naturelles de départ pouvant servir l’escalade sont différentes. C’est la loterie de la génétique. Le métabolisme représente l’ensemble des réactions biochimiques de synthèse et de dégradation qui se produisent dans l’organisme. Par exemple, le métabolisme du glucose désigne l’ensemble des processus biochimiques grâce auxquels l’organisme est capable de synthétiser et de dégrader le glucose (définition issue du Guide de l’alimentation du grimpeur). Nos besoins énergétiques et notre capacité à utiliser cette énergie sont donc fonction de ce métabolisme.
Notre niveau d’entraînement et les méthodes d’entraînement utilisées influent également sur notre métabolisme et peuvent le faire évoluer. L’objectif de l’entraînement est de conduire notre corps à s’adapter, à évoluer pour devenir plus performant dans la réalisation d’une activité. Les capacités d’adaptation de notre corps à l’entraînement sont également différentes pour chacun.
On peut donc difficilement se comparer à quelqu’un d’autre.
La performance de ces grimpeurs à l’alimentation déséquilibrée peut également s’expliquer par leurs efforts antérieurs pour atteindre ce niveau. Peut-être ont-ils beaucoup plus travaillé d’autres aspects également essentiels de la performance :
Peut-être que ces grimpeurs nourris aux burgers ont encore un volume d’entraînement beaucoup plus important, qu’ils ont une dépense énergétique globale plus élevée. Et pas seulement par la grimpe, mais peut-être aussi pratiquent-ils d’autres sports, d’autres activités de la vie quotidienne énergivores comme le jardinage, jouer avec les enfants, sortir le chien. Ils ont peut-être aussi un métier moins sédentaire, un mode de vie plus actif où ils se déplacent souvent à pied ou à vélo. La dépense énergétique journalière de 2h d’entraînement en salle ne représente pas énormément à côté de 22h de sédentarité.
Ce que les autres nous laissent voir n’est peut-être pas non plus l’entière réalité. Peut-être qu’en fait ces grimpeurs ont une alimentation très cadrée le reste du temps quand on ne les voit pas à la salle ou en falaise. Ou peut-être qu’ils ne font pas toujours 3 repas par jour ou ne couvrent pas tous les jours leurs besoins par manque de temps ou d’organisation. On sait rarement ce qu’il se passe réellement dans la vie des gens. D’une manière générale, il est toujours prudent de suivre cet accord toltèque de Miguel Ruiz : « Ne faites pas de suppositions. »
Une alimentation déséquilibrée et inadaptée à la pratique sportive entraîne des carences en micronutriments. Des manques en vitamines, minéraux et antioxydants qui jouent des rôles importants dans le fonctionnement du corps. Mais ces carences ne sont pas toujours visibles à court terme. La lenteur de cicatrisation de la peau des doigts ou des douleurs musculaires et articulaires peuvent parfois être compensées par une plus importante résistance à la douleur ou une plus grande motivation.
Mais dans tous les cas, les carences en micronutriments induites par une alimentation désordonnée auront des répercussions sur le risque de blessures, les capacités de digestion et de réparation du corps, l’efficacité du système immunitaire, la santé à plus long terme, et de fait, sur la possibilité de continuer à pratiquer encore longtemps dans de bonnes conditions.
Ce que vous mangez aujourd’hui impacte vos performances d’aujourd’hui mais aussi votre santé de demain. Pensez-y si vous voulez grimper encore longtemps !
Et finalement, ces grimpeurs qui n’accordent pas d’importance à leur alimentation sont-ils vraiment à leur niveau max ? Vous imaginez de quoi ils seraient capables si en plus ils mangeaient correctement pour nourrir leur performance ?